DES ENERGIES, DES HOMMES ET L'OR NOIR
Des énergies, des hommes et l'or noir
Du premier puits de pétrole, jaillit l’or noir en août 1859. De ce forage effectué dans les profondeurs de la Terre, naitra l’histoire de l’or noir et des énergies ‘’fossiles’’, jusqu’à nos jours.
Les hommes s’entretueront pour le pouvoir, l’argent, la cupidité et la possession des nouveaux territoires et des mers, dont leur unique concession sera celle d’occulter les dommages collatéraux engendrés par l’aveuglement et l’avidité inopérante à concevoir que la terre est également un organisme vivant ayant ses propres fonctionnements physiques. Et en l’état de cette conséquence existentielle et cause réelle, si l’homme n’apprend pas à conjuguer ses différents problèmes et multiples facultés, avec le climat, cette extraordinaire TERRE, risque malheureusement après deux siècles, d’industrialisation forcenée et de consommation matérielle et énergétique souvent anarchique, d’émettre quelques signes rendant difficile la meilleure évolution de la vie sur son sol.
Où à l’Est du nouvel Eden, lorsque les puits d’énergies fossiles auront fini de cracher leurs dernières liquidités noires, les hymnes nationaux des anciens régimes autocratiques auront cessé d’émettre les mauvais accords impropres à une possible unicité, et que le ‘’petit homme sage’’ drapé d’un sarrau blanc, avec un regard malicieux chaussé d’une paire de lunettes rondes, se sera définitivement détourné de la route du sel, car il aura compris que la destruction de celui de la vie est engendré par les 14 milliards de ‘’pieds’’ avançant toujours avec frénésie vers plus de consommation devenue compulsion consumériste anarchique envers Dame Nature.
Le dogme de l’asservissement de ‘’l’Homme’’ par l’homme.
L’enjeu est toujours le même depuis des siècles: convoiter et s’approprier les territoires, afin d’accaparer les richesses de la terre, et asservir les hommes, les femmes et les enfants, au nom du dogme de l’évolution technologique absolutiste et de l’efficience d’une culture au rapport d’une autre… Et pour condition à cette nouvelle découverte énergétique, en celle d’essayer de prendre le puits du voisin, que celui-ci se situe à l’intérieur de la patrie ou à l’extérieur du territoire national, quitte en cas de non-obtention d’accords commerciaux entre les protagonistes, à mettre en place des processus d’accaparement par une géopolitique, notoirement axée sur des fonctions indigentes, dont la seule finalité est assurément en celle d’établir des intendances sous-jacentes engendrant les conflits armés et guerriers entre les communautés territoriales et autres corporatismes identitaires et culturels…
Les méthodes sont toujours les mêmes, appointer des individus de peu de culture universelle, leur autorisant à croire avoir suffisamment de patriotisme, pour devenir soit des héros de la nation, soit des agents ayant fait leur devoir de réquisition envers les richesses et propriétés ‘’dues’’ à cette même mère patrie. Ces ignorants n’imaginent pas que cette dîme reçue et donnée par des entités d’obscurs desseins, est juste une rétribution permettant à ces individus de peu de conscience humaniste, philosophique, et ontologique de s’approprier les richesses matérielles, d’asservir le vivant sans autre forme d’accord que leurs prosélytismes délétères afin de modeler le monde naturel comme bon leurs semble… Et tout cela sans aucune forme de déontologie.
Puis au moment voulu armer les tueurs et les lancer à l’attaque, persuadés de se battre pour leur indépendance, accompagnés par une poignée de mercenaires pour qui l’argent à dans le cas de l’or noir une forte odeur de naphte accordée à de néfastes effets moribonds.
Mais n’oublions pas, dans l’histoire de l’humanité, que les liens entre les hommes et les femmes, les énergies et les évolutions technologiques, le(s) bien(s) et les services, la communauté et le corporatisme, la sociologie et le pragmatisme individualiste, l’argent et l’art des gens, la connaissance et l’ignorance, la culture universelle et les cultes obscurs, l’ontologie et l’épistémologie, font parties des paradoxes entre les sciences et les arts, et par conséquent affectés aux corps ‘’biophysiques’’ et à l’esprit.
Quoiqu’il en soit l’ère de l’industrialisation avait déjà commencé un demi-siècle, avant le forage, à 23 mètres de ce premier puits de pétrole en Pennsylvanie, ce 28 août 1859…
Où régnait encore la loi de la Winchester et du colt à six coups…
‘’L’histoire secrète du pétrole’’… 1971.
(Jacques Bergier et Bernard Thomas)
L'histoire secrète du pétrole
1/8 - Le temps des grands rapaces
https://youtu.be/ebZRnJJP1Rw
2/8 - Le temps des complots
https://www.youtube.com/watch?v=NUFnah4466w&t=21s
3/8 - Le temps des batailles pour l'or noir
Le plus intéressant pour comprendre ce qui s'est passé les années suivantes... Dans .le monde.
https://www.youtube.com/watch?v=hEtu9ASolBw&t=3s
4/8 - Le temps des premiers craquements
https://www.youtube.com/watch?v=oeLSPxkOuAo&t=24s
5/8 - Le règne despotique des 7 sœurs
https://www.youtube.com/watch?v=SGBjAnNlIt8&t=4s
6/8 - Le temps des magouilles
https://www.youtube.com/watch?v=7l6037wBCJc&t=25s
7/8 - Le temps des règlements de comptes
https://www.youtube.com/watch?v=acnerZYELJY&t=41s
8/8 - Le temps des scandales et du repli
https://www.youtube.com/watch?v=jFAiKgu71oA&t=66s
Une gigantesque partie d’échecs est en cours, à l’échelle de la planète : Hommes, races, nations, sentiments, idéaux ne sont que des pions poussés par des adversaires qui pensent en termes de puissance, non de philanthropie. Des pions inconscients, dans la plupart des cas. On utilise les rivalités, les haines locales, on les envenime, et les pions s’entre-tuent, persuadés de la justesse de leurs revendications. Jusqu’au moment où, dans un sursaut de désespoir, ils se révoltent.
Cela arrive aussi.
La lecture des journaux, aussi bien informés soient-ils, ne nous livre que la croûte des choses : le point de vue partiel et passionnel des belligérants. Lorsque le débat s’élève, on nous parle par exemple d’un combat idéologique entre communisme et capitalisme, sans nous en expliquer les véritables raisons. Sans nous révéler pourquoi ce combat a éclaté ici plutôt que là. Bref, il existe bel et bien un complot du silence autour de certains faits.
Prenons l’exemple du conflit israélien, et tâchons d’oublier un instant les motifs subjectifs pour lesquels nos sympathies vont à un camp, ou à l’autre. Le point de départ de la guerre est clair : les Sionistes sont venus occuper un territoire précédemment habité par des hommes d’une autre religion, les Palestiniens musulmans. On comprend ce qui a poussé là les Sionistes : le retour à la Terre Promise après 2000 ans d’errance et de persécutions. On comprend que les Arabes se soient sentis spoliés. On comprend fort bien que Juifs et Arabes en soient venus aux mains : lorsque deux paysans ne sont pas d’accord à propos d’un champ, il peut arriver qu’ils sortent le couteau. Mais si des richissimes amis leur prêtent des canons de 75, nous soupçonnons que des intérêts plus graves sont en jeu.
En réalité, le Sinaï est un désert où l’on meurt de soif. La Palestine en était à peu près un, avant l’arrivée des Israéliens. Essayons d’être objectifs : rien ne ressemble davantage à une dune de sable qu’une autre dune. Avec un peu de bonne volonté, on aurait pu reloger le million de réfugiés palestiniens un peu plus loin, au lieu de les parquer sous des tentes misérables, de les maintenir depuis vingt ans dans un état qui n’est pas tout à fait la mort, grâce aux trois cents calories par jour que leur distribue l’O.N.U. Il y a théoriquement de la place pour tout le monde dans cette partie du globe. Or, ce ne sont pas des canons de 75, mais des milliards de matériel de guerre qui ont été distribués de part et d’autre. De quoi planter suffisamment de blé, de riz et d’oliviers, creuser suffisamment de canaux d’irrigation dans le désert, pour rendre riches et heureux, non seulement les Palestiniens clochardisés, mais d’autres Millions de sous-alimentés en d’autres lieux.
Il faut bien en conclure que les réfugiés ne sont qu’un prétexte. Ces bouts de sable valaient, la peine, pour certains, d’y investir des milliards, non pas pour les rendre fertiles, mais pour les posséder.
De quoi s’agit-il ?
D’une querelle raciste, religieuse, idéologique ?
S’il s’agit d’apprendre aux gens les bienfaits de la libre entreprise capitaliste, ou au contraire ceux du socialisme marxiste, est-ce une méthode logique que d’envoyer des bombes avant les détracteurs et nouveaux challengers ? Est-il raisonnable de dépenser tant d’argent pour catéchiser une poignée d’illettrés ?
Est-ce au nom de la philanthropie qu’on les barde d’armements ? Est-ce par souci humanitaire qu’on risque de déclencher une troisième guerre mondiale ?
Ni ce qu’on appelle l’impérialisme d’Israël d’un côté, ni la frustration des Arabes de l’autre, leur volonté de récupérer quatre arpents de sable, n’expliquent le napalm ou les appels au génocide d’un Choukeiry.
Ils n’expliquent surtout pas les chars, les avions, les missiles, les radars mis à leur disposition.
Ni l’empressement qu’on a montré à les remplacer dès qu’ils ont été détruits.
La réalité tient en un mot : l’ENERGIE.
Un pays qui ne dépense pas d’énergie est pareil à un être humain qui passerait sa vie sans rien faire, allongé sur un lit : il est à peu près mort. Un pays possédant des sources d’énergie insuffisantes sur son territoire doit aller en chercher ailleurs pour vivre : c’est le cas du Japon, de l’Angleterre, la France, etc… Ainsi que l’Allemagne lors de la deuxième guerre mondiale, déclenchée par Hitler et ses sbires, pour des raisons principales d’accaparement, de puissance et de pouvoir. Et un pays que ses richesses naturelles ont rendu si puissant qu’il éprouve un besoin supplémentaire d’activité, ira également en chercher ailleurs : c’est le cas des États-Unis. Or, cette énergie, plus que le charbon, l’électricité ou l’atome, c’est le PETROLE.
Il deviendra la première ressource énergétique mondiale à partir du milieu du XIXème siècle et jusqu’à nos jours…
« Cherchez le pétrole «, pourrait-on dire aux êtres humains soucieux de comprendre ce qui se passe autour d’eux. A l’origine ou dans le développement d’à peu près tous les conflits depuis le début du siècle, on trouve le pétrole. C’est que le pétrole est le sang de notre civilisation. Sans lui, les moteurs des bateaux, des avions de guerre ou de commerce, des blindés et des voitures particulières, s’arrêtent ; plus d’huile ni de graisses pour les rouages ; plus de caoutchouc synthétique pour les pneus, plus de plexiglas pour les cockpits des avions, de glaces pour les automobiles. Plus de défense nationale possible.
Plus de travail non plus.
Napalm, T.N.T., nylon, tergal, dacron, orlon, insecticide, engrais chimique, carrosserie, assiettes, tuyaux d’arrosage, crème de beauté, table de jardin, nappe pour la table, vernis, fleurs artificielles, toitures, rideaux, rouge à lèvres, noir pour les yeux, vernis à ongle, sous-vêtement, lessive, éponge, cuvette, brosse à dents, cire, gaz de cuisine, encre d’imprimerie, asphalte, paraffine, films : près de 300 000 produits divers sont tirés du pétrole. La catastrophe provoquée en Occident par le manque de pétrole serait inimaginable.
Or, certains ont su se rendre maîtres des sources pétrolières : ce sont les grands trusts. L’argent allant aux riches et la puissance aux puissants, leur emprise sur le monde tend à devenir démesurée. Les super bénéfices réalisés par eux ne restent pas inactifs au fond des coffres bancaires.
Remis en circulation, ils servent de moyens de pression dans les domaines les plus divers : scientifique, économique, politique, voire même culturel et éducatif…
Au bout du compte, ces investissements colossaux, d’allure parfois inoffensive, font boule de neige et reviennent à leur point de départ sous forme de super-superbénéfices.
Chacun des grands trusts dirige plus ou moins directement des centaines de sociétés filiales, brassant des milliards de milliards de devises, couvrant le monde entier de tentacules gigantesques. Leurs activités commencent à l’exploration des terrains propices et se terminent à la vente en passant par l’Exploitation, le transport, le raffinage et la fabrication des produits finis. Nous verrons plus loin en détail ce que représentent ces trusts, ainsi que leurs dirigeants, dotés de l’esprit de convoitise suffisant, pour en faire des chefs de ‘’guerres’’…
Apatrides dans la fantasmagorie monétaire.
Retenons juste qu’ils seront, dans la sphère pétrolifère du XXème siècle, au nombre de sept, avec pour patronyme commun à ces sociétés internationales, œuvrant dans le domaine des énergies fossiles : LES SEPT SŒURS.
De 1860 à 1927
A partir de 1860, cependant, la lampe à pétrole se perfectionne et son usage s’étend ; on met au point les premières cuisinières et les premiers chauffages centraux à pétrole lampant.
Le début du XIXème siècle est majoritairement assujetti aux découvertes scientifiques et développements technologiques, et par la même favorisant ce que l’on nommera un peu plus tard : L’ERE INDUSTRIELLE et le PRODUCTIVISME.
En dix ans, pour la seule vallée d’Oil Creek, la production passe de dix mille à cinq millions de tonnes.
C’est alors qu’en 1870 un certain John D. Rockefeller s’associe avec quelques personnages falots pour fonder la Standard Oil Company of Ohio. Son idée de départ : offrir au public des produits de qualité suivie, des produits standardisés, au lieu des mille variétés inégales trouvées dans le commerce.
Idée n° 2 : acquérir le contrôle progressif de tout ce qui a trait au pétrole, depuis les entreprises de forage jusqu’aux organismes de vente au détail, en passant par le transport et le raffinage, de façon à ne pouvoir être victime d’aucun moyen de pression.
Idée n° 3 : rationaliser la production et le marché du pétrole en poussant par tous les moyens – persuasion, ruine, violence – les autres sociétés à se joindre à lui. Ce qui aboutit, le 2 janvier 1882, à la création du Standard Oil Trust formé par la fusion de quarante compagnies qui remettent leurs destinées entre les mains de Rockefeller.
En 1897, le Trust prend le nom de standard Oil of New jersey, et devient la compagnie la plus puissante du monde.
Rockefeller est probablement le plus grand des aventuriers du pétrole. C’est un personnage hors-série. Sa volonté de puissance sans limites est servie par un sens de l’organisation prodigieux. C’est lui le véritable inventeur des méthodes et des mœurs du capitalisme moderne. Peu lui importe le nombre de rivaux qu’il a contraints au suicide : son éthique tient en un mot, l’efficacité économique, productrice et financière.
Il est probable que son nom a été plus souvent cité dans les journaux de son époque que celui de, Hitler lui-même. Et cela en des termes si peu flatteurs que le Roi du Pétrole s’aperçut que ses affaires s’en ressentaient. Aussi prit-il bientôt à son service un certain Ivy Lee, chargé uniquement de chanter ses louanges : la profession de ‘’public relations’’ était née.
Elle sera nommée plus tard : ‘’Lobbying’’.
La pression de l’opinion publique et de ses conseillers, disent les uns, un remords tardif, affirment les autres, le poussèrent vers la fin de sa vie à utiliser une partie de son immense fortune pour créer diverses fondations de bienfaisance tout à fait exemplaires, il faut bien le reconnaître. Après avoir réussi tant d’affaires avec les hommes, il voulut encore en faire une avec Dieu le Père : vivre cent ans. Il échoua de peu. Né en juillet 1839, il mourut en mai 1939 dans son palais de Floride.
La petite histoire ‘’To trust’’ signifie faire confiance : les parties prenantes font confiance à la direction qui prend à leur place les décisions importantes.
Certains racontent que, pendant les dernières années de sa vie, il ne lisait plus qu’un seul journal, spécialement imprimé pour lui, et composé exclusivement des nouvelles susceptibles de lui plaire. Si l’anecdote n’est pas véridique, elle est digne de l’être. Rockefeller fut le type même de ce qu’on appellerait aujourd’hui un patron de combat. Il n’a probablement jamais lu de sa vie d’autres livres que comptables, et s’il écoutait beaucoup la radio, c’était surtout pour les informations. Quant à sa passion pour la musique, l’orgue principalement, il n’a jamais gaspillé beaucoup de temps pour l’assouvir. En revanche, en 1858, il disposait de 500 dollars. En 1865, de 50 000 dollars ; en 1870 (à trente et un ans) d’un million de dollars ; en 1885, 100 millions ; en 1900, un milliard. En 1910, il atteint deux milliards de dollars.
C’est l’homme le plus riche de son époque. Mais ce n’est pas l’argent qui l’intéresse : c’est la puissance.
La fortune n’est qu’un moyen de l’acquérir.
Pour mettre un terme à cet appétit dévorant, des lois anti-trust successives sont votées. En 1911 notamment, un décret rétablit l’indépendance de toutes les sociétés Standard. Le colosse devra se résigner à ne pas devenir seul maître du monde. Il ne sera jamais abattu pour autant : en 1958, la Standard Oil of New Jersey signalait son revenu le plus important depuis sa création: 809 millions de dollars.
« Le développement de ma société a été automatique. Il ne pouvait en être autrement étant donné la sévérité de la concurrence », déclarait Rockefeller en 1932 au cours d’une interview accordée au grand spécialiste allemand Anton Zischka.
Cette analyse marxisante du rôle d’un patron d’entreprise est bien modeste. En fait, Rockefeller a été un grand conquérant.
Un siècle plus tôt, Napoléon se forgeait un empire colossal à coups de charges de cavalerie.
Lui avait compris, le premier peut-être, qu’au XXe siècle, la cavalerie, c’était le dollar.
Il ne pouvait pourtant pas tout prévoir.
En 1901, au Texas, à Spindletop, le pétrole se met à jaillir avec une telle force qu’il provoque une nouvelle ruée.
Deux nouvelles compagnies sont issues de l’aventure : la Gulf Oil Corporation et la Texas Oil Company, si prospères dès le début que Rockefeller ne peut rien, contre elles. Et puis il y a le reste du monde. La prodigieuse aventure de la Pennsylvanie fait réfléchir, un peu partout. Elle stimule les intuitions qu’avaient déjà plusieurs précurseurs. On découvre du pétrole en Alsace, à Péchelbronn ; en Galicie ; en Roumanie. L’Europe occidentale, s’apercevant qu’elle est dépourvue de gisements, se tourne d’abord vers l’Europe orientale. Puis les Hollandais se rendent en Indonésie ; les Anglais en Birmanie.
Les trois frères Nobel, fabricants de dynamite à l’origine, esprits curieux et inventifs, secondés par les Rothschild de Paris, prennent le contrôle du pétrole russe de la mer Noire dont ils inondent l’Europe et l’Asie.
Après sept ans d’efforts, au bord de la ruine, mais soutenu en sous-main par le gouvernement anglais, William Knox d’Arcy, capitaliste qui avait fait une première fortune en découvrant une mine d’or en Australie, fait jaillir en 1908 le naphte en Iran, où il a obtenu du Shah l’exclusivité des recherches et de l’exploitation. L’Amirauté britannique se met alors à envisager avec audace la conversion de la flotte entière du charbon au pétrole. Pour réaliser ses plans, elle reprend en main l’affaire de d’Arcy et fonde l’Anglo-Persian Company, où elle s’assure une part d’actions majoritaire. L’Anglo-Persian deviendra plus tard l’Anglo-Iranian, puis en 1954, la British Petroleum.
En 1890, un obscur Hollandais nommé Hendrik August Wilhelm Deterding débarque aux Indes néerlandaises.
Le directeur d’une petite compagnie pétrolière appelée Royal Dutch Petroleum, August Kessler, l’a engagé comme ‘’employé de bureau, agent’’. Il s’occupe d’abord d’un petit comptoir, en pleine jungle, à Sumatra. Il s’en occupe si bien que, six ans plus tard, à la mort de Kessler, c’est lui qui prend sa succession.
Il invente ‘’le marché chinois’’.
L’Empire du Milieu est bientôt envahi de bidons et de lampes à pétrole Royal-Dutch. Sa société est si florissante que Rockefeller tente de la racheter : en vain. Dès lors, il lui déclare la guerre.
La face du monde va en être changée.
A la même époque, le banquier Marcus Samuel se trouvait à la tête d’une importante société d’import-export qui faisait commerce de tous les produits imaginables entre l’Angleterre, l’Extrême-Orient et vice-versa. L’un des articles qui se vendaient le mieux était un coquillage japonais : aussi Samuel avait-il adopté pour emblème une coquille Saint-Jacques et donné à sa société le nom de Shell (coquillage). Le pétrole, que des chercheurs découvrirent pour son compte à Bornéo, prit progressivement une part prépondérante dans ses activités.
Samuel voulut alors attaquer Rockefeller sur son propre terrain, aux États-Unis. Mal lui en prit: comme par miracle, les puits texans auxquels il s’intéressait se mirent à diminuer leur production. La situation devint rapidement catastrophique pour Deterding et pour Samuel. Rockefeller, profitant de l’essor extraordinaire de l’automobile, centupla sa production. Il se mit à vendre des quantités grandissantes d’essence.
Le kérosène, destiné aux lampes d’éclairage, et sur lequel Deterding et Samuel avaient bâti leur fortune chacun de leur côté, était devenu pour Rockefeller un sous-produit qu’il pouvait se permettre de lancer sur le marché à des tarifs de plus en plus bas.
La guerre des prix fit rage sur les cinq continents.
Un malheur n’arrivant jamais seul, le Tsar menaça de nationaliser ses puits de Bakou, dans lesquels tout le monde avait acquis entretemps de gros intérêts. Bref, la Royal-Dutch de Deterding aurait pu produire de l’essence, mais elle ne possédait aucun marché pour le vendre : La Shell de Samuel aurait bien eu un marché mais elle n’avait que du fuel ; et les bateaux de Sa Gracieuse Majesté n’étaient pas encore équipés pour le brûler. L’impitoyable tactique de Rockefeller était en train de les ruiner. Il fallait s’unir sous peine d’être rachetés à bas prix par l’ogre américain : ce que les deux compagnies se décidèrent à faire en 1907.
Les actions furent partagées 60% pour les Anglais, 40% pour la Hollande (la couronne de Hollande est personnellement intéressée à l’affaire depuis l’origine), pourcentage qui n’a pas varié jusqu’à présent. Henry Deterding adopta alors la nationalité anglaise. Il deviendra par la suite, comme Samuel, membre de la Chambre des Lords. Alors enfin la Shell put tenir tête à la Standard. Deterding, le Napoléon, contre Rockefeller, le roi du pétrole : l’empoignade fut grandiose. C’est à l’acharnement de cette lutte que la Russie des Soviets doit d’avoir survécu. 1914-1918 : Deterding, c’est indéniable, participe à la victoire alliée. Le sénateur Béranger déclare officiellement : ‘’M. Deterding est connu et aimé en France comme l’un des plus puissants collaborateurs industriels de la défense de Verdun et des deux victoires de la Marne’’.
Ce n’est pas faux.
Peut-être faudrait-il y regarder de plus près.
L’Allemagne, avant la Première Guerre mondiale, avait entrepris le fameux « Drag nach Osten », la poussée vers Osten : l’Est ! La construction d’un chemin de fer reliant Berlin à Constantinople, puis à Bagdad et au Golfe Persique, d’une part, à l’Arabie et à la mer Rouge de l’autre, était en cours. Le but, à peine voilé, de l’Allemagne consistait à devenir maîtresse du marché européen. Or, bien loin de s’y opposer, Deterding s’associa à ce projet qui le servait dans sa lutte contre Rockefeller. Ou plutôt, il jouait le double jeu : l’amitié qui liait le Sultan de Constantinople à l’Allemagne lui permit (ainsi qu’à la B.P. ; alors encore l’Anglo-Persian), d’éliminer l’Américain des puits fabuleux de Mossoul et de Mésopotamie. Mais d’un autre côté, il se méfiait de ce partenaire trop entreprenant. En mars 1914, cinq mois avant la déclaration de guerre, un traité : fut signé qui répartissait ainsi les pétroles turcs : 75% pour l’Angleterre ; 25% pour la Prusse (ces 25% dont nous hériterons après la guerre) :
Si bien que Deterding, à partir d’août 1914, attendit de voir comment les événements militaires allaient tourner avant de prendre parti. Lorsqu’il vit que les alliés avaient bloqué l’avance allemande, il vola au secours de la victoire : Dans le cas contraire, ses origines hollandaise (pays neutre), et son association avec la Deutsche Bank, lui auraient sans doute permis aisément de changer son fusil d’épaule.
Quoi qu’il en soit, l’issue de la guerre lui permit de participer à la curée sur les anciennes zones d’influence allemande : Deterding, associé avec la British Petroleum (ex Anglo-Persian) et la Compagnie Française des Pétroles, s’empara de l’Irak. Où M. Callouste Sarkis Gulbenkian, diplomate, aventurier, homme d’affaires arménien génial, conserva les 5% qu’on lui avait précédemment octroyés en échange de ses bons services. Et où Rockefeller n’eut de cesse qu’il puisse s’introduire. Alors, la guerre entre le roi et le Napoléon du Pétrole, qui avait marqué une trêve de 1914 à 1918, reprit de plus belle. En 1920, elle tournait à l’avantage de Deterding : ‘’ Je puis dire que les deux tiers des gisements exploités dans l’Amérique Centrale et l’Amérique du Sud sont entre des mains anglaises...
Dans les États de Guatemala, Honduras, Nicaragua, Costa-Rica, Panama, Colombie, Venezuela et Equateur, [...] l’immense majorité des concessions sont entre des mains britanniques. [...] Si l’on considère la plus grande de toutes les organisations pétrolières, le groupe Shell, il possède en toute propriété, ou il contrôle des entreprises dans tous les champs pétrolifères du monde, y compris les États-Unis, la Russie, le Mexique, les Indes Néerlandaises, la Roumanie, l’Égypte, le Venezuela, la Trinité, l’Inde, Ceylan, les États Malais, le Nord et le Sud de la Chine, le Siam, les Détroits et les Philippines... Avant peu de temps, l’Amérique sera obligée d’acheter le pétrole à coups de millions de livres sterling par an aux sociétés anglaises et devra payer en dollars. (Article du Times, mars 1920).
Cependant, sur un autre front, se produit un coup dur : en 1920, les bolcheviks arrivés au pouvoir depuis trois ans nationalisent les puits de pétrole de leur pays. Deterding en conçoit une fureur inimaginable. Campagnes de presse anticommunistes à l’échelle mondiale, émission de faux roubles destinés à couler la trésorerie russe, intrigues, complots, conspirations, espionnage, fourniture d’armes et d’argent à la révolte de Géorgie, aux Russes blancs, aux agitateurs, formation d’une gigantesque coalition pétrolière contre les Soviets, où l’on retrouve Gustav Nobel ; création d’une armée, d’une flotte et d’une monnaie spéciales pour Wrangel, chargé de reconquérir son pays, puis pour l’amiral Koltchak : tout lui est bon pour rayer l’U.R.S.S. de la carte du monde.
Car il ne s’agit de rien moins que de cela !
Il entretient des réseaux d’agents secrets ; il appuie, quand il ne les fonde pas, les sociétés d’anciens propriétaires de fonds russes dépossédés par la nationalisation, il rachète à bas prix le plus de titres possible, et tente en sous-main de négocier une association avec la Russie. Les Soviétiques, prêts à céder au plus offrant le surplus de leur production, refusent de lui accorder le monopole de l’exportation.
En 1922, Deterding réussit à faire rompre les relations diplomatiques entre la Grande Bretagne et l’U.R.S.S. Du coup, les Soviétiques se retournent vers les Américains, inquiets de leur côté de l’hégémonie anglaise qui se dessine, servie par la toute puissante Royal Navy et l’inquiétant Intelligence Service. Rockefeller est en perte de vitesse. En 1927, Staline lui fournit à bas prix 4 millions de tonnes de pétrole : d’où une contre-attaque de Rockefeller contre Deterding.
Et le match continue.
La haine de Deterding contre le drapeau rouge s’accroît encore.
Le 21septembre 1927, l’U.R.S.S. propose le remboursement à la France des emprunts lancés du temps du tsar : « Le gouvernement de l’Union des républiques soviétiques socialistes accepte de verser au titre de sa quote-part, pour le règlement des emprunts d’avant-guerre émis ou garantis par les anciens gouvernements russes et cotés en France, 41 annuités de 60 millions de francs or chacune, représentant le nombre moyen des annuités fixées dans le tableau d’amortissement et prévues par le contrat d’émission ; 10 annuités de 60 millions de francs or chacune à titre de l’arriéré et représentant la compensation des versements non effectués depuis l’interruption du service de la dette ; 10 annuités de 60 millions de francs or, chacune à titre de bonification supplémentaire... à déposer à titre de provision, dans un délai de six mois à dater de ce jour, dans une banque de France, une somme de 30 millions de francs or représentant la moitié de la première annuité destinée au paiement des porteurs d’emprunt d’avant-guerre... »
Deterding réussit à faire échouer l’opération en exigeant comme condition préalable la « dénationalisation » des pétroles en question.
Quels furent ses agents d’influence en France ?
En réalité, on ne sait pas très bien. Et ceux qui savent ne peuvent ou ne veulent pas parler. La seule chose qui soit claire dans l’histoire du pétrole depuis le début du siècle jusqu’à nos jours (exclusivement), c’est la bonne volonté stupéfiante mise par les hommes d’affaires comme par les responsables politiques français à laisser dépouiller notre pays.
Bêtise, manque d’imagination, absence de combativité, ou bien résultat de pourcentages adroitement distribués par l’étranger ?
Il y a assurément des exemples des deux.
Date de dernière mise à jour : 31/07/2020
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